14-04-2025 19:30 - POINT DE MIRE. Croissant Rouge Mauritanien. Un nouveau président. Et après ?

Mohamed Ould Chighali -- Le 7 avril 2025, l’Assemblée générale du Croissant-Rouge mauritanien a élu un nouveau président. Boullah Ould Megueya, succéde à Mohamed Lemine Ould Mohamed Vall qui était à la tête de l’institution depuis 2012.
Créé en 1970 pour faire face aux conséquences catastrophiques de la grande sécheresse de 1968, le Croissant Rouge Mauritanien, société de secours volontaire membre du Mouvement de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, est passé par la gestion de quatre responsables entre 1970 et 2025.
Mariam Daddah, la première Première Dame du premier président du pays, Madame Sall née Tokosselle Sy, sage-femme d’Etat, épouse de Feu Sall Abdel Aziz, ancien président de l’Assemblée Nationale, Ahmed Ould Sidi Ould Ahmed Aida, ancien chef d’Etat-Major de la Garde nationale, colonel de l’Armée à la retraite, et Mohamed Lemine Ould Mohamed Vall, professeur de Langue, ancien ministre et ancien diplomate.
A cours de ses 55 années d’existence, le Croissant Rouge Mauritanien est passé par plusieurs étapes pour devenir ce qu’il est aujourd’hui.
Evolution étape par étape par étape et petit-à -petit.
Mariam Daddah, la première présidente du Croissant Rouge Mauritanien avait surtout travaillé sur la naissance juridique de l’Association, l’élaboration de ses instruments juridiques (statuts, règlement intérieur et règlement financier) mais également avait travaillé pour asseoir une structure administrative adaptée à la vocation et la mission sociale et humanitaire de l’institution naissante.
Madame Sall, Née Tokosselle Sy, la deuxième présidente du Croissant Rouge mauritanien, a joué le rôle le plus important dans la vie de l’institution. C’est elle qui avait eu à charge la lourde responsabilité de mettre en place la logistique et les moyens nécessaires pour faire face aux conséquences d’une sécheresse sans précédent et de conséquences désastreuses au début des années 70.
Avant d’être remplacée à la tête de l’institution par son successeur le Colonel Ahmed Ould Sidi Ould Ahmed Aida, Madame Sall née Tokosselle Sy, une femme dont la popularité avait dépassé toutes les frontières de notre pays, avait fait du Croissant Rouge mauritanien une institution puissante, respectable et respectée aussi bien sur le plan national que sur le plan international.
Tout le monde lui reconnait d’avoir laissé derrière elle une société très bien structurée, très compétitive et très bien écoutée au sein du Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant- Rouge. A son départ en 1986, Madame Sall Tokosselle Sy avait laissé derrière elle une société forte, qui brillait par un très grand respect sur la scène internationale.
Une société nationale dont les tentacules étaient étendues à 55 comités locaux actifs, répartis sur l’ensemble du pays. Elle avait par ailleurs, après son départ, laissé un patrimoine foncier important dont des infrastructures logistiques à Nouakchott et des entrepôts à Kiffa, infrastructures qui permettaient de mener des activités avec professionnalisme, compétence et efficacité durant les interventions d’urgence et au cours des opérations d’interventions décentralisées.
Les documents de passation de service soumis à la signature de la présidente sortante et du président entrant, témoignaient pour la postérité d’une très bonne santé financière prouvée par des comptes bourrés d’argent et une comptabilité matière qui faisait ressortir des stocks de sécurité de plus de 13.000 tonnes de produits divers destinés à des réponses aux catastrophes.
Après le départ de Madame Sall, -que son âme repose en paix-, le Croissant Rouge Mauritanien quelques années plus tard s’était retrouvé dans plusieurs zones de turbulences, toutes caractérisées par des secousses sismiques liées à une mauvaise gestion de ses moyens matériels et financiers, ce qui avait amené les pouvoirs publics à intervenir pour organiser une Assemblée Générale mettant en place une nouvelle direction..
Une société nationale qui renait des cendres grâce à une bonne gouvernance.
En 2012, Mohammed Lemine Ould Mohamed Vall dit Isselmou, un des plus brillants professeurs de langue de son époque, avait hérite d’une société « ensevelie » sous les gravats d’un effondrement total de toutes ses capacités logistiques et financières, mais plus grave encore, de son identité morale, ce qui éloignait d’elle des partenaires qui, traditionnellement finançaient des projets de développements, des opérations de secours, et appuient des activités de réponses aux catastrophes et aux plus importants programmes de résilience.
Monsieur Isselmou Ould Mohamed Vall, ancien ministre, ancien Wali et ancien ambassadeur avait fourni un effort de titan et il était arrivé quand même à redresser la barre d’une société nationale qui était en perdition dans un océan de problèmes quasiment insolubles.
Durant ses deux mandat, Mohamed Lemine Ould Mohamed Vall avait épongé les arriérés de salaires du personnel, (arriérés qui portaient sur une période de plus de trois ans pour certains employés), il avait épongé les arriérés de la Caisse nationale de sécurité sociales portant sur plus de 10 ans, il avait réglé les impayés de l’ITS, et il avait inscrit tout le personnel de l’institution à l’assurance maladie.
Il avait d’autre part et à son actif fait construire des entrepôts pour asseoir une politique de recouvrement de couts, mis en place des programmes d’assistance de proximité variés et multidimensionnels, et organisé des transferts monétaires au profit des personnes les plus vulnérables victimes de catastrophes naturelles.
A la fin de sa mission à la tête du Croissant Rouge Mauritanien, le 08 avril 2025, le président sortant Mohamed Lemine Ould Mohamed Vall avait apposé sa signature, sur un procès-verbal de passation de service, véritable preuve de la bonne santé d’une institution qu’il avait rehaussé à un niveau institutionnel et à laquelle il avait redonné une crédibilité pour faire revenir les partenaires.
Il laisse en héritage à son successeur Bouallah Ould Mogueya, une société nationale en plein essor et épanouie. A l’actif de la société nationale, au moment du départ de l’ancien président, aucune dette, pas d’arriérés de salaires, aucun impayé à la caisse Nationale de sécurité Sociale, aucune dette contractée avec des fournisseurs et impayée.
Mohamed Lemine Ould Mohamed Vall, laisse derrière lui des employés mis dans de très bonnes conditions et dont les salaires de certains ont été majorés de plus de 100 % grâce aux moyens propres de la société. Il laisse un département de la jeunesse, épine dorsale de la Société, très bien équipé et très bien outillé pour des poursuivre des formations didactiques et pour des interventions d’urgence, mais également un service de réponses aux catastrophes prompt à répondre à toute situation.
Mais aussi et surtout, le président sortant, Mohamed Lemine Ould Mohamed Vall, dit Isselmou laisse derrière lui des ressources financières importantes qui frôlent les 150.000.000 d’ouguiyas anciennes domiciliées dans différents comptes opérationnels de la société Nationale et près 300.000.000 d’ouguiyas anciennes de financements déjà acquis et en attente de transferts graduels. Ce qui est très rare de nos jours dans ce pays où, beaucoup de responsables raclent les dernier sou avant de passer service.
Sur le plan de la gestion, Mohamed Lemine Ould Mohamed Val, l l’ancien président du Croissant Rouge Mauritanien, reste l’un des présidents des sociétés nationales de la sous-région auquel unanimement est reconnue une bonne intégrité morale dans la gestion des moyens de son institution.
Sur le plan structurel, les formations des ressources humaines continues ont été considérablement renforcées ces douze dernières années pour mettre les volontaires et les secouristes au niveau de compétence requis par la spécificité de la mission sociale et humanitaire de l’institution qui, le 8 mai prochain, un mois jour après jour depuis l’arrivée de Boullah Ould Mogueya à la tête du Comité de direction, célèbrera la Journée Mondiale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Boulah Ould Mogueya, élu et après ?
Depuis le lundi 7 avril 2025, les destinées du Croissant Rouge Mauritanien sont entre les mains de Boullaha Moguéya, qui hérite d’une institution forte et en bonne santé sur le plan financier et logistique. En principe, son travail doit s’inscrire dans la continuité des très nombreuses réalisations accomplies par son prédécesseur.
Même si, sur le plan logistique et financier, la société nationale offre des capacités pour maintenir un bon cap dans la réalisation de programmes inscrits aux activités bilatérales de la Société Nationale avec des partenaires incontournables comme, la Fédération Internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, la Croix-Rouge Française, la Croix Rouge Britannique, le Croissant Rouge qatari et la Croix-Rouge Espagnole entre autres, elle restera confrontée à des défis majeurs avant de retrouver la place qui lui revient sur l’échiquier des activités sociales et humanitaires des pouvoirs publics dont elle est auxiliaire.
Elle doit se faire restituer tout son patrimoine foncier, s’atteler à réviser ses instruments juridiques pour les adapter à l’environnement actuel des activités menées sur le terrain et surtout, elle doit impérativement renouveler ses structures locales usées par le temps et le manque de conformité avec ses statuts.
Avec son Secrétariat Général actuel dont les compétences sont reconnues sur le plan international et par toutes les institutions partenaires auxquelles le Croissant Rouge Mauritanien adhère, tout sera possible.
Mais pour achever l’ouvre commencée par son prédécesseur et pour redresser le Croissant Rouge Mauritanien, le nouveau président Boullah Ould Mogueya, riche d’une longue expérience dans beaucoup de domaines, aura impérativement besoin d’être épaulé par les pouvoirs publics pour surmonter les derniers obstacles qui se dressent encore devant la société nationale pour qu’elle sorte définitivement des difficultés accumulées ces trente dernières années pour différentes raisons, le plus souvent indépendantes de la volonté de sa gouvernance.
Le nouveau président Ould Mogheya, jeune, technocrate et intellectuel, doit user d’une diplomatie humanitaire forte auprès des pouvoirs publics pour surmonter les quelques obstacles qui se dressent encore sur le parcours du combattant qu’emprunte le Croissant Rouge depuis 1970, date de sa création.
Mohamed Ould Chighali
Journaliste indépendant
Groupe de Presse Francophone de Mauritanie