06-12-2015 22:30 - L’indépendance proclamée le 28 Novembre 1960

L’indépendance proclamée le 28 Novembre 1960

Le Calame - Le Calame a déjà publié (le 28 Novembre 2007) un récit de cette proclamation. Puis, le 23 Novembre 2010, les faits et les circonstances de la proclamation, selon les synthèses de la représentation diplomatique française : n° 10, 11 et 12 couvrant la période du 1er Novembre au 31 Décembre 1960.

Enfin, l’événement vu depuis Atar et vécu par le nord du pays selon les services de renseignements français, a été présenté le 30 Novembre 2010. L’ambiance générale est maintenant donnée telle qu’elle fut ressentie sans que soient présents pour les participants aux fêtes du 28 Novembre 1960 (deuxième anniversaire de l’option du Territoire pour le statut d’Etat membre de la Communauté) des éléments astreignants et multiples : terrorisme organisé en faveur de la revendication marocaine, boycott par les pays arabes à la seule et notoire exception tunisienne, difficile pétition auprès de l’ancienne métropole d’une exception mauritanienne.

Des mois de délais entre l’indépendance proclamée et une indépendance positive : les accords de coopération, que ne garantissait pas même une place dans la Communauté dite « rénovée ».

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Le Premier ministre mauritanien, M° Moktar Ould Daddah (qui ne sera chef de l’Etat, qu’à la suite du transfert des compétences de la Communauté à la République Islamique de Mauritanie), répond au Premier ministre français, Michel Debré – le 19 Octobre 1960 – à l’Hôtel de Matignon à Paris, après la signature de l’accord

Vous comprendrez mon émotion que je ne chercherai pas à vous cacher, car je viens de signer l’acte le plus important qu’un homme en général, qu’un homme d’Etat africain peut signer, c’est-à-dire l’accession à l’indépendance de son pays.

Voici donc, à partir de ce jour, la Mauritanie, la République Islamique de Mauritanie : indépendante, indépendante dans l’amitié entre son peuple, le peuple mauritanien, et le peuple de France.

Comme vous l’avez dit, tout à l’heure, et je ne reviendrai pas sur ce que vous avez dit, – cette seconde solennelle est l’aboutissement d’une évolution harmonieuse et qui a pu, en ce qui nous concerne, nous permettre – après avoir franchi toutes les étapes que vous connaissez – de passer du stade de colonie à celui aujourd’hui d’Etat indépendant.

Vous avez parlé tout à l’heure du général de Gaulle. Je ne peux laisser passer l’occasion sans, à mon tour, rendre hommage à son action et à tous ses efforts pour créer et développer la Communauté rénovée, Communauté de peuples fondée sur la coopération volontaire et librement consentie de toutes les parties composantes, mais dans le respect absolu de ce qui est essentiel, fondamental pour chaque pays, c’est-à-dire la souveraineté nationale de chaque pays.

Le général de Gaulle, comme vous l’avez dit tout à l’heure, a commencé cette évolution à Brazzaville, et cette évolution est aujourd’hui terminée en ce qui nous concerne parce que nous sommes le dernier Etat de la Communauté à accéder à son indépendance.

Donc, c’est quand même, je crois, un fait incontestable, qui fait honneur à la France qui, en l’espace de quelques mois, a mené à l’indépendance douze Etats qui étaient hier colonies.

La Mauritanie, de par sa position géographique, de par la composition ethnique de ses populations, qui en font ce que nous avons souvent appelé le trait d’union entre l’Afrique blanche et l’Afrique noire, la Mauritanie dis-je a une vocation particulière à jouer dans le devenir africain d’une manière générale et dans le devenir, je crois, de la Communauté rénovée, fondée par le général de Gaulle.

Mais je ne puis laisser passer l’occasion sans vous faire part, comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire – en toute amitié en d’autres circonstances – le déchirement de nos consciences du fait de ce drame qu’est le problème algérien.

Vous savez pourquoi notre conscience est déchirée : parce que ce drame oppose des amis de toujours, des amis avec lesquels nous voulons conserver longtemps les meilleurs rapports, des amis dont nous avons besoin pour nous épauler dans l’évolution de notre pays – j’ai parlé de la France – et de l’autre côté, il y a des frères de race, de religion, de civilisation, de sentiment.

Et vraiment, nous sommes en ce qui nous concerne – je ne vous le cache pas – douloureusement frappés par ce drame. Mais ce n’est pas un cri de désespoir que je lance, parce que je fonde personnellement beaucoup d’espoir, et tous les espoirs, en la personne du général de Gaulle pour trouver une issue convenable, une issue favorable à ce drame ; et je lui fais confiance. Je suis sûr qu’il la trouvera parce qu’il a déjà trouvé des solutions à des problèmes beaucoup plus graves[i].

Il a sauvé la France lorsqu’elle était, pendant la guerre, occupée. Il a réussi à tourner, à modifier le courant de l’Histoire en ce qui concerne l’Afrique et à faire de la France une grande puissance africaine grâce à la compréhension qu’il a des problèmes, de la vision historique qu’il a des phénomènes et du fait que, voyant que les rapports ne pouvaient plus être fondés comme par le passé sur la force ou d’autres rapports d’une autre nature, il a su donc trouver la formule qu’est la Communauté, et qui fait de la France une grande puissance africaine.

Il reste une grosse tache, une tache noire à l’horizon mais je veux personnellement lui faire confiance et espérer qu’il lui trouvera une issue aussi favorable que celle qu’il a trouvée pour l’évolution des Etats africains.

Une fois cette solution trouvée au drame algérien, la France sera incontestablement la grande puissance africaine parce que – vous avez parlé tout à l’heure de l’Afrique française et d’expression française – oui, l’Afrique d’expression française est une réalité vivante, et une réalité dont le monde entier est obligé de tenir compte parce que tous les dirigeants de cette Afrique d’expression française ont été façonnés dans des établissements d’enseignement, ont été pétris de votre discipline

La Mauritanie, quant à elle, veut entretenir non seulement les meilleures relations avec la France, avec les peuples d’Afrique aussi bien noire que blanche, mais avec les peuples du monde entier.

Naturellement, dans ces rapports, elle sera toujours particulièrement marquée pour la France. Car, encore une fois – je m’excuse d’avoir été un peu long – car, encore une fois, la France a permis à la Mauritanie, encore hier image d’Epinal pour ceux qui aiment l’exotisme, hier colonie, hier Territoire, hier Etat autonome et désormais à une République démocratique et indépendante.

Cela, je n’ai aucune honte à le reconnaître, nous le devons à la France ; la France nous y a préparés, et aujourd’hui sans amertume, sans regret, vous nous avez accordé l’indépendance que nous vous avions demandée.

Nous avons même rencontré auprès de vous, Monsieur le Premier Ministre, Messieurs, une compréhension particulière parce que lorsque nous vous avons fait comprendre que, contrairement à ce que nous avons convenu il y a quelques mois, nous ne pouvions, nous ne voulions pas signer les accords de coopération. Vous avez accepté notre point de vue. Vous nous avez transféré ce que nous vous avons demandé, c’est-à-dire notre souveraineté et notre indépendance.

Les accords de coopération dans une Communauté rénovée seront signés le moment venu, seront négociés, mais comme vous le disiez tout à l’heure, du moment que les négociations seront abordées dans un esprit amical, dans un esprit de compréhension, sans arrière-pensée, dans un esprit de respect mutuel de notre souveraineté, puisque désormais à partir de l’instant que nous vivons, il y a deux souverainetés distinctes, – donc dans le respect de nos souverainetés – ces négociations seront abordées et conduites, j’en suis sûr, à bonne fin.

Je termine en vous redisant une fois de plus : merci, Monsieur le Premier Ministre, et je vous demande de transmettre ce grand merci au général de Gaulle, père de la Communauté, et de le transmettre également à la France dont le nom est lié à tant de prestige, tant de gloire dans tous les domaines . . .

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Agence France Presse

Près de mille invités à Nouakchott pour les fêtes d’indépendance de la Mauritanie

Nouakchott, 25 Novembre (1960). – Près de mille invités sont attendus vendredi, samedi et dimanche à Nouakchott, capitale de la République Islamique de Mauritanie, où se dérouleront pendant deux jours les fêtes de l’indépendance de la Mauritanie, qui sera proclamée solennellement le 28 novembre à zéro heure, au cours d’une séance à l’Assemblée Nationale Mauritanienne en présence des délégations venues du monde entier.

A la suite des aménagements de la piste, les long-courriers en provenance d’Europe pourront être accueillis directement à l’aérodrome de Nouakchott, sans relais à Dakar comme il avait été prévu primitivement.

Vendredi matin, 25 novembre, deux « Bréguets deux ponts » d’Air France en provenance de Marseille atterriront à Nouakchott avec à bord le personnel hôtelier chargé du service des réceptions. Un « DC 4 » venant de Dakar se posera un peu plus tard avec le ravitaillement. Samedi 26 novembre, deux « DC 4 » d’Air France amèneront de Dakar les premiers invités.

C’est, toutefois, le dimanche matin 27 novembre que l’aéroport de Nouakchott fera figure d’aéroport international avec l’arrivée de deux « Super-constellation » d’Air France et d’un « DC 6 » de l’U.A.T. en provenance de Paris avec à bord les personnalités invitées par le gouvernement de la République Islamique de Mauritanie.

De Dakar, deux « DC 4 » et un « DC 3 » d’Air France amèneront les délégations officielles du Sénégal et des autres Etats africains, ainsi que des journalistes, venus de ces différents Etats pour couvrir les manifestations. Enfin, de Saint-Louis-du-Sénégal, un « Bréguet deux ponts » d’Air France partira avec cent passagers.

Près de mille invités à Nouakchott pour les fêtes d’indépendance de la Mauritanie

Nouakchott, 28 Novembre (1960) . – « En vertu des accords signés entre la France et la Mauritanie et approuvés par les Parlements des deux Etats, je proclame solennellement l’indépendance de la République Islamique de Mauritanie ». C’est par ces mots prononcés d’une voix émue que M. Moktar Ould Daddah, Président du Gouvernement Mauritanien, a consacré la souveraineté de la nouvelle nation mauritanienne, dont il devenait ainsi le chef de l’Etat.

Avec cette accession à l’indépendance, tous les Etats de l’ancienne Afrique Occidentale Française, de l’Afrique Equatoriale Française et de Madagascar sont maintenant souverains.

Au moment où M. Moktar Ould Daddah prononçait cette phrase solennelle, l’assistance debout et visiblement très émue, couvrit sa voix de ses acclamations. Le canon se mit à tonner lentement tandis que l’hymne national mauritanien, inspiré de chants folkloriques du désert, retentissait pour la première fois.

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Message manuscrit du général de Gaulle – lu par le Premier ministre français, Michel Debré

Ancien et noble pays, la Mauritanie accède aujourd’hui à la souveraineté internationale en confiante et fraternelle amitié avec la France.

La République française et la République Islamique de Mauritanie resteront fidèles l’une à l’autre, fières de leur passé valeureux, sûres de leur avenir solidaire et prospère.

J’adresse au peuple mauritanien mon salut et les vœux de la France.

Vive la Mauritanie !

Vive la France !

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Agence France Presse

Entretiens africains à Nouakchott

Nouakchott, 28 Novembre (1960) . – Aujourd’hui lundi la Mauritanie laisse le pas à l’Afrique. La République Islamique de Mauritanie vit son premier jour d’indépendance, mais les fêtes marquant la proclamation de sa souveraineté sont pratiquement terminées et l’attention des observateurs venus à Nouakchott se fixe plutôt maintenant sur les chassés-croisés des délégations étrangères et notamment africaines.

Les voitures à fanions des chefs de délégation circulent entre les grands blocs de bâtiments de la ville neuve, encore séparés par de larges espaces de sable et des arbrisseaux brûlés.

La principale réunion s’est tenue, jusqu’à présent en fin de matinée au domicile de M. Moktar Ould Daddah, chef d’Etat de la Mauritanie, où elle groupe les représentants de 8 pays africains, dont 5 chefs d’Etat. Quatre des participants appartenaient aux pays du Conseil de l’Entente, c’est-à-dire : Côte d’Ivoire, Niger, Haute Volta et Dahomey.

Les quatre autres étaient les représentants du Sénégal, du Cameroun, de Madagascar et de Mauritanie dont le drapeau vert émeraude à étoile et croissant blancs, claquant au vent de sable, domine le bâtiment où s’abritèrent les conversations interafricaines.

Autre événement marquant : M. Michel Debré, premier ministre, quitte Nouakchott lundi dans la soirée, comme prévu pour regagner Paris mais, avant de partir, il a reçu, dans la matinée M. Houphouët-Boigny, chef d’Etat de la Côte d’Ivoire.

Il n’est pas exclu que M. Michel Debré reçoive dans la journée d’autres leaders africains, M. Masmoudi, ministre tunisien de l’Information, pourrait en particulier, s’entretenir avec M. Debré. M. Masmoudi n’assistait pas à la réunion des leaders africains tenue dans la matinée chez M. Moktar Ould Daddah.

Il visitait pendant ce temps, une exposition artisanale. Le bruit court que le ministre tunisien pourrait ne pas rentrer immédiatement à Tunis après les fêtes de l’indépendance et qu’il pourrait même se rendre dans d’autres Etats africains où il aurait des conversations avec les dirigeants, notamment sur le problème algérien. Cet élément, qui n’est encore qu’une rumeur, prendrait, s’il se confirmait, un certain relief à la veille du débat à l’O.N.U.

Nouakchott s’éveille à la vie administrative

Nouakchott, 29 Novembre (1960) . – Avec la présentation, lundi après-midi, des lettres de créance des premiers diplomates accrédités auprès du gouvernement de Nouakchott, l’indépendance de la Mauritanie a pris une existence plus visible.

Tour à tour, M. Anthonioz, haut représentant de la France en Mauritanie, puis MM. Villard, Watson et Reichold, respectivement représentants des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de l’Allemagne Fédérale, ont remis à M. Moktar Ould Daddah les documents les accréditant pour représenter leur gouvernement dans la capitale mauritanienne.

Nouakchott retentit des derniers échos de la grande fête dans une ville neuve, en plein désert et qui s’éveille à la vie politique et administrative qui sera bientôt la sienne. Les unes après les autres les grandes administrations mauritaniennes vont en effet déménager de Saint Louis, ancienne capitale, vers le nouveau siège du gouvernement.

Mais avec le départ aujourd’hui mardi, par avion des centaines d’invités venus célébrer l’indépendance, la capitale de la Mauritanie, dès ce soir reprendra son aspect « far west » de vaste chantier dans les sables, centre d’un pays de 800.000 habitants, deux fois grand comme la France et qui s’éveille à son avenir fait de mines de fer, de cuivre, de puits de pétrole et du développement de son élevage.

* * *

Agence France Presse

La demande mauritanienne d’admission aux Nations Unies

Nations Unies, 29 Novembre (1960) . – Voici le texte du télégramme adressé au Secrétaire général des Nations Unies le 28 novembre 1960 par le Premier Ministre de la République Islamique, M. Moktar Ould Daddah demandant que le Conseil de sécurité soit saisi de la demande de la Mauritanie d’être admise aux Nations Unies :

« La République Islamique de Mauritanie ayant accédé le 28 Novembre 1960, à la souveraineté internationale et à l’indépendance, est désireuse d’assumer intégralement les nouvelles responsabilités qui lui incombent sur le plan international et d’apporter sa coopération aux activités de la communauté des Nations Unies. publique

« Le gouvernement de la République Islamique de Mauritanie a donc décidé de solliciter sans tarder l’admission de la République Islamique de Mauritanie comme membre des Nations Unies.

« Aussi, ai-je l’honneur de vous demander au nom de mon gouvernement de bien vouloir, conformément à l’article quatre de la Charte des Nations Unies, soumettre la candidature de la République Islamique de Mauritanie aux délibérations du Conseil de Sécurité en vue d’obtenir la recommandation nécessaire à son inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée générale actuelle.

« Le gouvernement de la République Islamique de Mauritanie déclare par la présente accepter les obligations que comporte la Charte des Nations Unie et être en mesure de les remplir. Il s’engage solennellement à s’y conformer en toute loyauté et conséquence ».

Allocution prononcée par le Général de Gaulle,

à Nouakchott, le 10 Décembre 1959

D’abord, je veux dire à M. le Premier Ministre de la République Islamique de Mauritanie combien les paroles qu’il vient de m’adresser m’ont touché.

Oui, je suis très heureux de pouvoir faire une fois encore visite à la Mauritanie.

Votre terre est particulièrement chère à la France, et par conséquent à moi-même. Nous avons longtemps ensemble déjà vécu, travaillé et combattu.

Et puis le peuple de Mauritanie est un peuple fier, courageux, qui en même temps a le culte de ses traditions et aussi veut se développer pour l’avenir. Et c’est pourquoi, en passant tout à l’heure devant vous, j’ai été particulièrement satisfait de serrer la main de beaucoup que je connais déjà et d’autres que j’ai vus pour la première fois, les uns étant les chefs traditionnels et les notables et les principaux du peuple, les autres étant déjà des hommes qui sont en train de préparer la transformation moderne du pays. Tous sont ensemble.

Pour son développement, la Mauritanie est en bonne voie. Voici que commencent l’exploitation, le chemin et l’emploi de votre fer et il en sera ainsi bientôt, j’en suis sûr, de votre cuivre et sans doute aussi d’autres ressources qui se trouvent sous votre sol.

Comme l’a dit le Premier Ministre tut à l’heure, cette œuvre de transformation s’accomplit par la coopération de la France avec la Mauritanie. Comment s’accomplirait-elle autrement ?

Votre peuple a pris en mains son propre destin. Dans les années qui viennent, dans le temps qui est devant nous, il est probable qu’il y aura beaucoup de changements dans les institutions, dans les rapports, comme on dit, entre la France et la Mauritanie, mais je suis convaincu que ce qui demeurera, c’est ce que l’on veut faire ensemble.

A mesure que votre jeune Etat précise sa personnalité, il lui vient peu à peu l’envie, l’idée, l’intention de la démontrer et de la faire valoir au dehors. Cela est très normal.

Mais dans la réputation et dans le destin d’un peuple au dehors, tout dépend en réalité de ce qui se passe au-dedans, tout dépend du travail que l’on fournit chez soi, de l’unité que l’on a ou que l’on n’a pas, et aussi de l’effort moderne que l’on fait ou que l’on ne fait pas.

Cet effort, en Mauritanie, vous avez commencé de le faire. Je vous répète que pour cette œuvre, la France est avec vous comme elle le fut hier et comme elle le restera demain.

Dans le monde comme il est, et qui est difficile et dangereux, demain comme hier, nous serons ensemble, tout droit, fraternels, la main dans la main.

Vive Nouakchott,
Vive la Mauritanie,
Vive la France.

Toast adressé à S.E. M. Moktar Ould Daddah, Président de la République Islamique de Mauritanie, 23 mai 1962

Le Général de Gaulle prend la parole lors d'une réception donnée au Palais de l'Élysée en l'honneur du Président de la République Islamique de Mauritanie.

La France se félicite de recevoir en votre personne la Mauritanie, son amie. Car, si cette contrée est empreinte d'un caractère géographique et humain très particulier, si certains ont pu se demander quel serait son comportement dés lors que le génie des temps modernes l'aurait abordée à son tour, bref, si elle a pu parfois poser comme une énigme quant à son avenir, chacun est aujourd'hui fixé. La voici marchant sur la route qu'elle-même a choisie. Cette route est celle du progrès. Elle y avance en compagnie de la France.

L'institution de la Mauritanie en un État cohérent est la preuve de cette réussite. Combien celle-ci est-elle méritoire ! Population vivant, pour la plus grande partie, éparse et mobile sur de très vastes espaces ; ressources naturelles qui ont longtemps paru des plus limitées ;

voisins souvent difficiles pour une région qui se situe entre le Maghreb et l'Afrique noire et entre l'Atlantique et le Sahara, telles étaient en effet, les conditions dans lesquelles votre pays a dû ériger sa personnalité et sa souveraineté nationales. Qu'il y soit cependant parvenu, voilà qui démontre d'une manière éclatante sa réalité, sa vitalité et sa capacité !

C'est qu'un peuple courageux et vigoureux l'habite. Les Maures nous semblent, à nous Français qui les connaissons bien, dignes d'être maîtres d'eux-mêmes. D'ailleurs, la nature ou bien la Providence a fait en sorte que votre sous-sol recèle des gisements miniers assez importants pour assurer à votre pays les moyens économiques et financiers qui lui permettront de contribuer largement et bientôt à son propre développement.

En outre, le cordial soutien de la plupart des jeunes États d'Afrique issus de la Communauté a facilité, d'abord la naissance de la Mauritanie en tant que peuple souverain, ensuite son existence au point de vue international.

Mais il me faut ajouter que la France a pu et a voulu, en toute connaissance de cause, aider la Mauritanie à accomplir son évolution. Nous avons conclu avec vous de solides accords à cet égard. Je puis vous assurer que, pour notre part, nous entendons poursuivre la marche à vos côtés dans la voie féconde et fraternelle de la coopération.

D'autant plus, Monsieur le Président, que, parmi toutes les raisons que nous avons de faire confiance à votre pays, l'une des meilleures, c'est que vous êtes qui vous êtes. Votre personnalité, nous la connaissions bien déjà avant que vos compatriotes vous aient confié la responsabilité d'être le Chef de leur État.

Mais, depuis, en vous voyant conduire au milieu de beaucoup d'obstacles les affaires intérieures et extérieures de la Mauritanie, notre considération et notre estime à votre égard se sont élevées au plus haut degré. Partout ici vous en verrez la preuve. Et moi, ce soir, je vous le dis franchement et simplement.

Je lève mon verre en l'honneur de M. le Président Moktar Ould Daddah, Président de la République islamique de Mauritanie, en l'honneur de Madame Moktar Ould Daddah à qui nous sommes heureux de présenter nos très respectueux hommages, en l'honneur de la Mauritanie sur qui la France croit pouvoir compter et qui peut compter sur la France.

[i] - à cette date, le principe d’autodétermination a été proclamé, mais le plus difficile est encore à vivre. La crise des barricades à Alger érigés en Janvier 1960 par les étudiants et les « ultras » a accéléré le processus d’organisation provisoire des pouvoirs publics, mais il y aura bientôt le putsch d’Avril 1961, puis l’O.A.S. aussi nihiliste que les adeptes du terrorisme soi-disant islamiste d’aujourd’hui, et même (Août 1962) une énième tentative d’assassinat du général qui faillit réussir à deux centimètres près



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Commentaires (1)

  • moukhabarat (F) 07/12/2015 15:16 X

    Choukran OUL KEYJA. Vous contribuez à la mémoire des mauritaniens... Pouvez-vous nous citer des témoignages de personnels de l'administration coloniale sur la société mauritanienne du siècle dernier.