01-12-2023 15:10 - Les femmes leaders pour le développement en Mauritanie marchent pour l’adoption de la loi contre les violences
À Nouakchott, des Mauritaniennes, députées, et militantes de la société civile, engagent un combat crucial, souvent passé sous silence, en faveur de leur projet de loi intitulé « la lutte contre les violences à l’égard de la femme et de la fille », connu sous le nom d’Al Karama, signifiant « dignité ».
Cette initiative a déclenché une vive opposition de la part des imams et des oulémas, qui estiment qu’elle va à l’encontre des principes de l’islam.
Dans le contexte de la commémoration du 63ème anniversaire de l’indépendance de la Mauritanie, les Femmes Leaders pour le Développement en Mauritanie (FLDM) ont manifesté le 27 novembre 2023 à Nouakchott, exigeant avec détermination l’adoption de la loi KARAMA, également connue sous le nom de loi contre la violence faite aux femmes et aux filles, actuellement confrontée à un blocage à l’Assemblée Nationale.
Conduites par leur présidente, Mme Anna Aïdara, les Femmes Leaders pour le Développement en Mauritanie (FLDM) considèrent que le vote de la loi KARAMA est une urgence pour protéger les femmes et les filles mauritaniennes contre les différentes formes de violence dont elles sont victimes, notamment, les violences domestiques, les viols et les discriminations multiples qui sont leur quotidien depuis des décennies.
Ces femmes, piliers du foyer, sont en effet protégées par la tradition, mais pas par la loi. Sans compter que leurs droits ne sont pas garantis dans cette société traditionnelle, encore empreinte de tabous. « Qu’on le veuille ou non, le viol existe dans les familles, mais cela est tu », rapporte un analyste politique.
La marche pour la dignité
Drapées de voiles et de boubous aux couleurs rouges vives et oranges, les femmes membres du FLDM ont brandi des pancartes où étaient inscrits des slogans en arabe et en français dénonçant la violence faite aux femmes et aux filles qu’elles considèrent comme le comble de l’humiliation.
Sur d’autres pancartes, on peut lire « pour briser le silence des femmes victimes de violence, appuyons la loi Karama ». Ou encore, « Marchons pour un avenir sans violence avec la loi Karama ».
Un combat au cœur des célébrations nationales
Alors que la Mauritanie s’apprêtait à célébrer la fête nationale de l’Indépendance, le 28 novembre 2023, plusieurs manifestations ont eu lieu à Nouakchott et à l’intérieur du pays avec des thèmes variés.
Cependant, la particularité de la marche organisée par les Femmes Leaders s’inscrit dans un combat qui vise à débloquer au niveau du parlement mauritanien l’une des lois les plus combattues par les groupes radicaux religieux appuyés par certaines voix réfractaires encore à toute révolution contre le caractère machiste d’une grande partie de la société mauritanienne.
La présidente de l’association, Mme Anna Aidara considère que le combat pour l’éradication de toute forme de violence à l’égard des femmes est un combat qui ne doit pas mobiliser seulement les femmes et que les hommes ont aussi le devoir de porter ce combat pour bannir toute forme de violence commise à l’encontre de cette frange. « Défendre cette cause qui fait partie des droits humains, c’est défendre aussi nos mères, nos sœurs, nos nièces et leur reconnaître le droit à la dignité » a-t-elle ajouté.
Il faut rappeler que la loi sur les violences contre les femmes continue de faire l’objet de controverses en Mauritanie. La presse internationale s’est saisie de la question comme les médias mauritaniens.
Le 2 octobre 2023 déjà à Nouakchott, plusieurs citoyens, imams et prédicateurs avaient profité de la rentrée parlementaire pour manifester devant le Parlement contre le projet de loi, soutenant que les versions du texte sont contraires à l’Islam. L’Etat mauritanien, mais aussi les hautes instances religieuses du pays avaient pourtant démenti ces allégations.
La société civile mauritanienne continue ainsi d’exiger son adoption et la marche organisée par les femmes leaders à la veille du 28 novembre en est une parfaite illustration.
Cheikh Aîdara