21-04-2021 16:00 - Ramadan 2021 : entre canicule, calculs et ….ridicule !

Ramadan 2021 : entre canicule, calculs et ….ridicule !

L'Eveil Hebdo - Mardi 13 avril a débuté le ramadan en Mauritanie, comme dans la plupart des pays musulmans. Comme tous les ans, le mois de jeûne rime avec flambée des prix.

Mais cette année, le phénomène est encore plus rude pour les ménages mauritaniens, alors que l’économie du pays est déjà très affectée par la crise du Covid-19. S’y est ajoutée cette année une météo inhabituelle à cette période de l’année, notamment à Nouakchott, avec une chaleur caniculaire accompagnée d’un vent de sable.

Alors, entre cette canicule, des calculs pour pouvoir joindre les deux bouts et les « mesurettes » ridicules prises par les autorités pour « soulager les familles les plus démunies », les Mauritaniens n’ont pas fini de tirer le diable par la queue – du moins ce qui en reste.

Le phénomène n’a rien de nouveau et, chaque année, il vient compliquer un peu plus la vie, déjà bien difficile et morose, de la grande majorité des Mauritaniens : avant chaque début de mois de jeûne, les prix de presque tous les aliments entrant dans nos habitudes culinaires prennent le mors aux dents pour atteindre des niveaux inabordables, pas seulement pour les petites bourses mais aussi pour la classe moyenne, gagnée elle aussi par la précarisation sociale.

Et, comme il fallait s’y attendre, le ramadan de cette année n’a pas dérogé à la règle et les prix de presque tous les aliments (fruits, légumes, viande…) ont connu une envolée. Les poches déjà bien vides, les smicards et autres travailleurs mal payés seront, encore une fois, mis à rude épreuve et attendront de se faire plumer lors des prochaines fêtes religieuses.

Pouvoir d’achat en chute libre

Particularité du ramadan de cette année, la flambée des prix est précédée par des pénuries de certaines denrées et par l’envolée des prix de certains produits comme le poulet. Conjugué à la situation sanitaire et à la crise économique qui sévit depuis plusieurs années dans le pays, ce surenchérissement ne manquera pas d’alimenter davantage un mécontentement social déjà à son paroxysme et « promet » des lendemains qui déchantent.

Certains observateurs n’hésiteront pas à tailler en pièces les commerçants qui fouleraient aux pieds les préceptes de l’islam. D’autres pointeront du doigt l’incivisme du Mauritanien qui achète plus qu’il n’a besoin, provoquant, du coup, pénuries et autres envolées des prix. Des arguties toutes trouvées car les vrais problèmes sont ailleurs.

Il y a d’abord l’implacable loi de l’offre et de la demande qui, dans un contexte de rareté, impose sa logique froide : quand un produit est trop demandé, son prix s’envole presque mécaniquement. Les prix des produits de consommation courante ont ainsi connu une hausse considérable.

Au niveau des principaux marchés des produits alimentaires à Nouakchott, les commerçants se livrent, apparemment en toute impunité, à toutes sortes de spéculations.

La flambée des prix concerne particulièrement les produits qui entrent dans la composition des plats les plus prisés au cours du mois du ramadan, notamment, les légumes et les viandes.

Ainsi, une paire de sacs de pomme de terre et d’oignons se vend à 8.000 ouguiyas anciennes, au lieu du prix habituel de 6.500 ouguiyas. Les consommateurs dénoncent, à travers les médias publics et privés, cette hausse qu’ils jugent « injustifiée ».

Des ménagères appellent les spéculateurs au respect des préceptes de la religion. « Le ramadan est un mois de clémence et de purification spirituelle et non un mois de gain et de spéculation », soulignent-elles.

D’autres consommateurs en appellent pour leur part aux autorités afin qu’elles interviennent pour réguler le marché et mettre de l’ordre dans les prix, dont la hausse ne cesse d’affecter le revenu des ménages, notamment les plus démunis.

Interrogés à propos de cette hausse, les détaillants se défaussent sur les grossistes. « Ce sont les grossistes qui ont imprimé cette hausse et nous sommes obligés de suivre pour ne pas accuser des pertes », affirment-ils.

Quant aux services chargés des contrôles des prix, ils ne réagissent guère pour arrêter cette vague de spéculations qui survient de manière récurrente à l’occasion de grands événements ou à l’approche des grandes fêtes.

Un responsable, sous le couvert de l’anonymat, soutient qu’il « est encore trop tôt pour une action efficiente qui pourra instaurer l’ordre sur le marché, surtout que le pays importe plus de 80% de ses besoins en denrées alimentaires ».

La plupart des légumes consommées en Mauritanie proviennent du Maroc ou du Sénégal voisin, s’ils ne sont pas importés d’Europe, notamment de l’Espagne. Le pays, à 80% désertique, n’arrive pas à réaliser une autosuffisance malgré les programmes gouvernementaux visant cet objectif à travers des projets d’agriculture irriguée le long de la rive droite du fleuve Sénégal.

La succession, ces dernières années, de rudes sècheresse a porté un coup sérieux à la production des céréales et de légumes dans le pays.

La responsabilité de l’État


Mais surtout, l’État régulateur est comme absent. Cela fait des années, voire des décennies, que le problème de l’augmentation des prix à chaque arrivée du mois de jeûne se pose et, à ce jour, on n’a pas pu le juguler.

Et pour faire bonne figure, les autorités, en l’occurrence le ministère du Commerce, nous a sorti une trouvaille : « Le ministère du Commerce, de l’Industrie et du Tourisme et la Fédération mauritanienne des boulangeries ont signé un accord pour réduire le prix du pain de 30 ouguiya ancienne monnaie pendant le mois de Ramadan à Nouakchott ».

En plus, le ministère a déclaré que l’accord créera 2 000 emplois pour les jeunes. Au titre duquel la Fédération des Boulangeries s’engagera à ouvrir des kiosques à Nouakchott pour vendre du pain dans des conditions respectant les normes d’hygiène et de qualité, et la proximité des consommateurs.

Le ministère a ajouté que l’accord prévoit la fourniture de 6 000 morceaux de pain par jour, dans les magasins « Opération Ramadan » à raison de 500 pains en moyenne par kiosque. Pour une population estimée au bas mot à un million d’habitants, dont plus des deux tiers vivent en dessous du seuil de pauvreté, dire que cette mesure est ridicule relève de l’euphémisme.

Sikhousso



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