22-03-2008 10:34 - Bref exposé sur la mondialisation

Bref exposé sur la mondialisation



Introduction


La mondialisation est un phénomène qui est l'objet de nombreux commentaires ou analyses. Certains milieux la disent "heureuse", voire génératrice de progrès, et font tout pour la faciliter. Par contre, elle est aussi à l'origine d'un courant de pensée dit "altermondialiste", auquel nous nous rattachons, et pour lequel la mondialisation est une réalité dont les conséquences se font ressentir de manière très négative.

Que ce soit dans les domaines économiques, sociaux et même écologiques, association pour la taxation des transactions pour l’aide aux citoyens dénonce depuis déjà quelques années ces conséquences négatives. On en a déjà beaucoup parlé, et ces conséquences ne seront donc pas l'objet principal de cette réflexion.

Celle-ci sera plutôt centrée sur les questions suivantes. Qu'appelle-t-on mondialisation ? Quelle est son histoire ? Sa nature ? Ses mécanismes profonds et leur logique ?

La mondialisation libérale et capitaliste


Qu'appelle-t-on mondialisation ? a mondialisation dont on parle est essentiellement celle de l'économie. C'est la mondialisation des échanges, un marché unique de biens et de capitaux tend de plus en plus à englober la planète entière. Au mot mondialisation sont souvent associés les mots "libérale" ou "capitaliste".

Comment la mondialisation des échanges marchands aurait-elle pu se généraliser dans le contexte d'Etats entourés de fortes et nombreuses barrières douanières ? Comment le processus ayant conduit à la mondialisation pourrait-il fonctionner en dehors d'un cadre général autre que libéral ?

Même si ce libéralisme laisse parfois quelques niches aux économies nationales, pour pouvoir se mettre en oeuvre la mondialisation nécessite des contraintes fiscales ou règlementaires les plus minimales possibles. Elle ne peut s'instaurer que par l'intermédiaire de la libre circulation des marchandises et du capital qui sert à financer leur production. En fait, la mondialisation est libérale parce qu'elle n'aurait pas pu être autrement.

Quant au mot capitaliste, la mondialisation est bien entendu celle d'un marché qui revendique lui-même ce terme. La mondialisation est certes libérale dans sa manière de se mettre en place, mais c'est avant tout la mondialisation du marché capitaliste. Il n'y a donc rien de gauchiste ou simplement d'anticapitaliste à parler de mondialisation capitaliste.

La mondialisation est bien à la fois libérale et capitaliste, et quand on parle de cette mondialisation les deux aspects sont inévitablement présents.

Eluder le fait que la mondialisation soit capitaliste et la réduire à son aspect libéral, ne permet pas de comprendre le phénomène dans sa globalité. Cela réduit les possibilités d'analyses, et par suite l'approfondissement des propositions alternatives.
Historique de la mondialisation

Le processus d'extension des échanges économiques n'est pas nouveau, on le trouve déjà dans l'Antiquité. Il y a plus de 2000 ans, l'Empire Romain étendait ses échanges non seulement à tout le bassin méditerranéen, mais aussi vers l'intérieur de l'Afrique et le Nord de l'Europe.

La tendance à la mondialisation de l'économie est constatée depuis longtemps par les économistes. Au début du 20ème siècle et jusqu'à la crise de 1929 (période très libérale), on a déjà pu observer une très forte extension des échanges internationaux de biens et de capitaux. On a ensuite observé une certaine stagnation des échanges jusqu'aux années 60, puis un décollage rapide de ceux-ci à partir des années 70.

Les années 70 correspondent à l'apparition de difficultés économiques. C'est la fin des trente glorieuses, ces 3 décennies de croissance économique où la prospérité générale semblait enfin devenue possible. D'une part, le système monétaire découlant des accords de Bretton Woods avait atteint des limites qui révélaient ses contradictions. D'autre part les économies nationales s'essoufflaient, générant chômage et inflation. L'extension de la libéralisation des échanges de biens et de capitaux apparaissait comme indispensable pour permettre le retour de la croissance.

Cette idée fut fortement promue par les milieux économiques et les grandes institutions financières internationales, la notion de libéralisation des échanges s'y retrouvant élargie à celle de privatisation et de marchandisation la plus large possible. Cette politique fut largement mise en œuvre par les gouvernements Thatcher et Reagan, et elle fut quasiment imposée aux pays en difficulté qui demandaient l'aide du FMI ou de la Banque Mondiale. Durant les années 80 et 90, pratiquement l'ensemble des pays de la planète dû à son tour s'y soumettre.

Caractéristiques de la mondialisation

Il s'agit là de tenir compte de certains aspects qui ne sont pas de simples conséquences de la mondialisation, mais qui lui sont directement associés, qui en sont constitutifs.

  • Internationalisation croissante des échanges.
  • Croissance du capital financier (marché des euros-dollars dès 1957) aboutissant à une dérèglementation financière qui commence au début des années 70 avec l'abandon des règles de parité stable entre les monnaies. Cette croissance s'accompagne d'un rôle de plus en plus important du capital financier dans la production de biens et services.
  • Internationalisation de la production, et montée en puissance des sociétés transnationales à partir des années 80. Grâce aux progrès des moyens de communication, on peut concevoir un produit dans un bureau d'étude et le faire fabriquer à moindre coût dans une usine située ailleurs sur la planète. Grâce à la baisse des coûts de transport, il peut maintenant être très avantageux de produire dans des pays même très éloignés.
Une caractéristique pourtant importante est souvent oubliée par les analystes, la mondialisation correspond à l'hégémonie du capitalisme financiarisé. Non seulement parce que ce système est devenu la norme dans pratiquement tous les pays, mais aussi parce que dans chaque pays développé c'est maintenant la quasi totalité des structures productives qui dépendent des lois du capitalisme.

En effet, on constate depuis les années 50 la disparition progressive de catégories jusqu'alors peu dépendantes du capital financier. En France comme dans bien d'autre pays, c'est toute la paysannerie qui disparaît ou qui devient totalement dépendante des banques et des entreprises agro-alimentaires. Il s'est produit le même phénomène pour toute une myriade de petites entreprises artisanales. Certaines ont disparu, d'autres ont été totalement absorbées par des sociétés plus importantes, et celles qui survivent se retrouvent bien souvent totalement dépendantes des crédits bancaires et des grosses entreprises à qui elles servent de sous-traitants. Il en est de même pour les petits commerçants.

Cette hégémonie du capitalisme se fait aussi sentir dans le démantèlement des services publics, privatisation signifiant ici dépendance au capital financier et à la loi du profit. Aujourd'hui, en France tout le monde dépend de la bonne santé de l'économie capitaliste, aussi bien les rentiers que les travailleurs du privé comme du public, aussi bien les actionnaires que les salariés, sans oublier les retraités, les chômeurs et les rmistes. La notion de mondialisation n'est donc pas seulement territoriale, elle est globale, car elle concerne les revenus et les échanges de tout un chacun.

Quelle logique sous-tend la mondialisation ?

La mondialisation est un phénomène socio-économique qui n'est pas arrivé par hasard. On peut d'abord constater que des choix ont été décidés, et que le processus aboutissant à la mondialisation a été facilité par des décisions d'origine politique. Toutefois, on ne peut pas se contenter d'une approche qui consisterait à penser que la mondialisation relève de la simple application d'une idéologie économico-politique. Ce serait tomber dans le simplisme de la théorie du complot, et on ne peut pas accuser tous les politiciens d'être des méchants, des corrompus.

Peut-on sérieusement accuser nos gouvernements d'union d'avoir agi uniquement par pur dévouement à l'idéologie néolibérale ? Quelles raisons profondes motivaient alors leur politique d'ouverture au capitalisme financier ?

Les décisions politiques qui ont conduit à la mondialisation reposent sur un contexte économique, celui d'une économie en crise. Comme je l'ai dit précédemment une période de relative prospérité économique se termine dans les années 70, le capitalisme régulé des trente glorieuses a permis une forte accumulation de capitaux financiers et ceux-ci n'arrivent plus à s'investir dans leurs pays d'origine.

La loi de l'offre et de la demande concerne aussi le capital financier, et la concurrence qui résulte de cette accumulation de capitaux entraîne une baisse des profits. Or, le mode de production capitaliste repose sur un financement privé de l'économie, et, pour motiver les épargnants à financer la production, il leur faut des profits. Sinon ils gardent leur monnaie, et la chute de l'investissement qui en résulte entraîne la crise économique. Comme l'écrivait l'économiste Keynes dans les années 30 : " le traitement du chômage passe par l'accroissement des profits.C'est la logique incontournable de ce système capitaliste.

Tout comme dans les années trente, il apparaît donc important de trouver de nouveaux débouchés au capital financier pour lui permettre de dégager de nouveaux profits, et pour permettre ainsi de sortir de la crise économique. C'est ici l'incontournable loi du profit qui commande, et on peut constater que toutes les mesures de libéralisation qui seront mises en œuvre vont dans le sens de cette loi.

Dans le contexte de cette crise qui débute dans les années 70 et qui dure toujours, il apparaît dans l'intérêt de chaque pays d'ouvrir ses frontières pour exporter les capitaux financiers de ses nationaux et leur permettre de dégager du profit . Seulement le capital financier n'est que la contrepartie de capital industriel, c'est à dire d'usines et de marchandises, et la libéralisation financière ne peut que s'accompagner de la libéralisation des échanges de biens et services. C'est alors tout un ensemble de mécanismes qui se déclenchent à partir des années 70.

En ouvrant ainsi les marchés,

  • les entreprises nationales sont mises en concurrence directe avec les entreprises étrangères. Ce qui entraîne des restructurations dévastatrices pour l'emploi.
  • les capitaux financiers sont mis en concurrence de plus en plus forte, et leurs propriétaires ou gérants jouent un rôle de plus en plus grand dans la gestion des entreprises, ils font tout pour maximiser les profits.
  • les Etats sont mis en concurrence : pour que les entreprises nationales soient compétitives il importe que leur coût de production soit le plus bas possible. Ce mécanisme est à l'origine d'un dumping économique et social qui entraîne pressions sur les salaires et les conditions de travail, chômage, précarité, atteintes aux acquis sociaux, etc. Ce sont alors les salariés nationaux qui se trouvent mis en concurrence directe avec les salariés étrangers et plus particulièrement avec ceux qui ont les revenus les plus bas de la planète.
Conclusion

Voilà où nous en sommes aujourd'hui, mais l'histoire n'est pas finie, et de nombreuses questions se posent. Dans la logique de ce système économique fondé sur l'investissement privé, le capital financier doit continuer à croitre sans cesse.

Certes, il peut sans doute exister des instruments de régulation permettant de compenser certaines conséquences particulièrement dévastatrices, mais qu'est-ce qui peut contrarier la logique de profit et de croissance du capital financier ? Où cette logique entraîne-t-elle notre système socio-économique, et nous avec ? On peut aussi s'interroger sur les alternatives possibles. En existe-t-il ? Peut-on imaginer des pistes de réflexion qui pourraient nous conduire à en construire ?

Le débat est jusqu'à maintenant ouvert sur cette question.

Moctar ould sidi ali.




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