Weli Cheikhbouya -- Dès le début de cette ère gazière, la Mauritanie doit se prémunir contre le double piège de la malédiction des ressources et d’une crise migratoire incontrôlée.

La Mauritanie se trouve aujourd’hui à un tournant stratégique avec le démarrage de l’exploitation de ses ressources gazières et la montée des flux migratoires.

La coïncidence entre ces deux dynamiques - d’une part, l’opportunité économique et, d’autre part, le défi migratoire - impose une gouvernance rigoureuse et des politiques adaptées afin d’éviter que le pays ne subisse une "submersion migratoire" aux conséquences économiques, sociales et sécuritaires potentiellement lourdes.

L’exploitation des ressources naturelles exige une gouvernance économique efficace pour assurer un développement inclusif à travers une gestion rigoureuse et transparente. La redistribution équitable des revenus issus du gaz doit permettre de créer des opportunités d’emploi et d’améliorer les conditions de vie de la population locale. Cela passe inévitablement par :

- La mise en place d’un fonds souverain pour assurer une gestion durable des revenus gaziers.

- L’investissement massif dans les infrastructures, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé et de l’énergie.

- L’appui aux secteurs économiques porteurs comme l’agriculture et la pêche, afin de diversifier l’économie et de limiter la dépendance aux hydrocarbures.

Face à l’augmentation des flux migratoires, la Mauritanie doit adopter une politique migratoire pragmatique, ferme et équilibrée, alliant contrôle et intégration.

Pour ce faire, il est essentiel de renforcer le contrôle aux frontières en coopération avec les partenaires régionaux et internationaux, afin de mieux réguler l’immigration clandestine.

Au-delà du contrôle, une politique d’intégration sélective doit être mise en place. Elle permettra d’accueillir légalement une main-d’œuvre qualifiée tout en évitant une pression excessive sur les services publics.

Ainsi, la signature d’accords de réadmission équilibrés avec l’Union européenne et les pays d’origine des migrants s’avérera nécessaire pour assurer un retour digne des immigrés en situation irrégulière.

Cette nouvelle dynamique contribuera à prévenir les tensions sociales et à renforcer la cohésion nationale, sachant que l’augmentation des flux migratoires peut engendrer des tensions entre populations locales et immigrées. Pour anticiper ces risques, il est crucial de :

-Promouvoir des campagnes de sensibilisation contre la xénophobie et pour une cohabitation pacifique.

-Impliquer les pouvoirs publics, les organisations sociales, les autorités religieuses et les chefferies traditionnelles dans la gestion des flux migratoires.

-Veiller à ce que les politiques publiques favorisent en priorité le bien-être des citoyens mauritaniens, afin d’éviter un sentiment de marginalisation.

Dès le début de cette ère gazière, la Mauritanie doit se prémunir contre le double piège de la malédiction des ressources et d’une crise migratoire incontrôlée.

Seule une gouvernance économique efficace, doublée d’une politique migratoire rigoureuse et d’une cohésion sociale renforcée, permettra de tirer pleinement profit des opportunités offertes par l’exploitation du gaz tout en préservant la stabilité du pays.