21-05-2025 16:02 - Paludisme en Mauritanie : un risque maîtrisable et une opportunité historique d’élimination d’ici 2030

Paludisme en Mauritanie : un risque maîtrisable et une opportunité historique d’élimination d’ici 2030

Le Quotidien de Nouakchott -- Alors que le paludisme continue de faire des ravages dans de nombreux pays africains, la Mauritanie pourrait bien représenter un tournant décisif dans la lutte contre cette maladie.

Grâce à une situation épidémiologique singulière, une volonté politique affirmée, et un appui financier conséquent des partenaires internationaux, le pays dispose aujourd’hui de tous les leviers pour viser l’élimination du paludisme d’ici à 2030.

Une transmission géographiquement et saisonnièrement limitée :

La Mauritanie présente une situation épidémiologique favorable à l’élimination du paludisme. La transmission est saisonnière, concentrée sur une période de moins de trois mois, principalement entre août et octobre et géographiquement restreinte à trois à quatre régions de l’est et du sud-est du pays à savoir les deux Hodhs, l’Assaba et le Taguant.

Alors que dans les autres régions, la transmission soit absente, soit extrêmement faible. Cette faible endémicité s’explique en grande partie par les caractéristiques bioclimatiques du territoire, dont près de 80 % est constitué de zones désertiques peu propices à la prolifération des moustiques vecteurs.

Des ressources mobilisées et une volonté politique affirmée :


Le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, principal partenaire technique et financier de la Mauritanie, a alloué d’importantes ressources pour intensifier les interventions antipaludiques (12.5 million de Dollars USA).

Ces efforts s’accompagnent d’un engagement politique fort et d’une coordination efficace assurée par un nouveau coordinateur du Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP). Cette dynamique crée une opportunité historique de passer d’une phase de contrôle à une phase d’élimination, en s’appuyant sur un système de surveillance renforcé et des stratégies ciblées.

Des stratégies différenciées selon les zones éco-épidémiologiques : Pour atteindre l’objectif d’élimination, des interventions adaptées aux spécificités régionales sont indispensables :

En zone saharienne (Nouakchott et les régions du nord) caractérisée par la présence de vivax :

Utilisation de tests de diagnostic rapide (TDR) capables de détecter P. vivax et P. falciparum, ainsi que de TDR pour le dépistage du déficit en G6PD,

Traitement des cas à P. vivax par chloroquine + primaquine, sous réserve d’un taux de G6PD normal,

Traitement des cas à P. falciparum par CTA (artésunate-amodiaquine ou artéméther-luméfantrine).

En zone sahélo-saharienne (les deux Hodhs, Assaba, Tagant) caractérisée par une transmission saisonnière forte à falciparum:

Renforcement des mesures de prévention et de prise en charge avec les CTA (artésunate-amodiaquine ou artéméther-luméfantrine),

Mise en œuvre de la Chimioprévention Saisonnière (CPS) chez les enfants de moins de cinq ans durant les trois mois de transmission (août, septembre et octobre).

En zone sahélienne (vallée du fleuve Sénégal) caractérisée par transmission faible :

Réduction progressive des interventions curatives, tout en gardant une vigilance accrue, Maintien d’un système de surveillance active,

Dans toutes les zones du pays :


Renforcer la surveillance entomologique et épidémiologique, Mettre en œuvre des études régulières sur la chimiorésistance et la sensibilité des vecteurs aux insecticides,

Création des sites sentinelles pour la surveillance entomologique et la réalisation des études longitudinales,

Développer un réseau de collaboration sous régional (Mali et Sénégal) pour l’échange de données et la mutualisation des efforts de lutte contre le paludisme.

Conclusion

La Mauritanie se trouve à un moment charnière de son histoire sanitaire. En misant sur des interventions stratégiques, une coordination efficace et une coopération renforcée, le pays peut non seulement éliminer le paludisme de son territoire, mais aussi devenir un modèle pour les autres nations en transition vers l’élimination. L’objectif 2030 est ambitieux, mais à portée de main.

Dr. Mohamed Abdallahi MOUKAH,
Enseignant chercheur de Parasitologie à l’Université de Nouakchott
Président du CCM de Mauritanie



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